Le Rouge-Cloître en 1606, gravure.
Les quinze étages (il n'en reste aujourd'hui plus que cing), la
somptueuse église bâtie en grès blanc et décorée de toiles de Rubens,
les nombres autres bâtiments, les champs, les vergers, les jardins
potagers, tous ces éléments en firent la perle de la forêt de Soignes.
En 1693, un incendie ravagea une partie des
bâtiments. La bibliothèque qui recelait un trésor de manuscrits,
enluminures et reliures réalisés sur place fut heureusement épargnée
par les flammes. Certains de ces livres furent transférés en 1794 à la
bibliothèque impériale de Vienne. Les bâtiments qui existent encore
actuellement ne donnent qu'une faible idée de la splendeur passée de
l'abbaye.
Le prieuré en 1725, gravure.
En 1783, le décret de Joseph II supprima de nombreux
ordres contemplatifs jugés inutiles, dont le couvent de Rouge-Cloître.
Dès lors, les religieux n'avaient que le choix de chercher à entrer
dans une autre congrégation ou dans la sécularisation.
La communauté de Rouge-Cloître se dispersa et ses
biens mobiliers furent vendus. C'est ainsi que les plus beaux
manuscrits de la bibliothèque après avoir été donnés à la Chambre
Héraldique se retrouvèrent dans les collections impériales de Vienne,
l'autel de Saint Augustin à l'église de Brages, l'autel de Saint Ubald
à l'église Saint Pierre de Wezembeek, le maître-autel à l'église
Notre-Dame-du-Lac de Tirlemont, la statue de ce maître-autel à l'école
normale de cette même ville (pour n'en citer que quelques-unes, parmi
toutes les oeuvres provenant de Rouge-Cloître).
Après quelques péripéties qui laissèrent croire à un
renouveau du couvent, celui-ci fut définitivement supprimé en 1796.
Vendue, la propriété changea alors souvent de propriétaires. L'église
brûla en 1834. Lors de la vente publique, les bâtiments déserts
devinrent la proie des spéculateurs et bientôt s'y installèrent les
premiers industriels. Sur le site fut installé une verrerie dans la
Maison de Savoie, une teinturerie dans la maison à côté du moulin, une
filature dans la maison du portier, puis vers 1873 une blanchisserie,
une fabrique mécanique de fagots, et enfin un restaurant au début du
XXe siècle.
Toutefois, ces diverses entreprises n'endommagèrent pas trop le site et elles disparurent vers la fin du XIXe siècle.
Le site du Rouge-Cloître devint alors un lieu de
prédilection pour les artistes qui, attirés par le charme de l'ancienne
abbye, se mirent à fréquenter le lieu.
En 1900, après un projet de construction d'un
barrage qui aurait noyé toute la vallée, on envisagea l'assèchement des
étangs en vue de la construction d'un lotissement ou encore de
l'installation d'un jardin zoologique. Ceci eut de bon que l'opinion
alertée amena les pouvoirs publics à prendre des mesures de sauvegarde.
En 1910, le domaine fut acquis par l'Etat belge, ce
qui mit fin aux menaces de morcellement et aux projets d'exploitation
saugrenus.
Le site fut classé en 1959 et devint propriété de la Région de Bruxelles-Capitale en 1992.
Aujourd'hui, la gestion du site est partagée entre
la Régie Foncière de la Région de Bruxelles-Capitale qui a la
responsabilité des bâtiments, et l'Institut Bruxellois de Gestion de
l'Environnement qui a en charge les espaces non bâtis. Depuis les
années septante, la Commune d'Auderghem loue certains des bâtiments à
la Région bruxelloise tels que celui qui renferme le Centre d'Art ou
encore des locaux accueillant actuellement des ateliers d'artistes.
L'inauguration du Centre d'Art se fit en 1977.
Le trésor perdu
Il existe une légende qui raconte qu'on aurait caché
un trésor dans le site du Rouge-Cloître! Ce trésor serait constitué
d'objets de culte en or et en argent, et de pièces de monnaie.
A la suite de l'édit de Joseph II, tous les biens du
prieuré furent mis sous séquestre. Lors de l'inventaire effectué en
1784, on constata que les biens les plus précieux avaient disparus. A
la suite de cette découverte, on arrêta un prieur nommé Terlaken. Il
fut interrogé et mis au secret, mais rien n'y fit, on ne sût jamais où
le trésor fut caché. L'enquête fut interrompue à la suite de la
Révolution brabançonne et de la Révolution française. Depuis, de
nombreuses recherches ont été effectuées par les propriétaires
successifs. Mais en vain... Personne ne trouva jamais le trésor perdu
de Rouge-Cloître!
Faites donc bien attention en vous baladant sur le
site et peut-être aurez-vous la chance de découvrir quelques richesses
au détour d'un chemin!
Sources: A. MAES, Rouge-Cloître, Rood Klooster,
plaquette publiée par la commune d'Auderghem et "Les prieurés de
Val-Duchesse et de Rouge-Cloître. Conseil de Défense des sites
historiques d'Auderghem", 1964.